Nain et géants

Ce fut, en quelque sorte, la petite excentricité littéraire du week-end dernier : confronter deux voyages qui n’avaient absolument rien en commun… en apparence !

Fulmir est un nain qui a atteint l’honorable âge de 160 ans. Au terme d’une riche existence, il prend la route pour aller mourir dans le cimetière de son peuple. Un lieu secret qui suscite bien des convoitises en raison des richesses qu’il contient. Mais, force est de constater qu’il est difficile de passer à trépas en solitaire. Les péripéties de son parcours l’amènent à se retrouver à la tête d’une véritable petite bande : un chien, deux orphelins, une maman et son bébé n’en finissent pas de contrarier ses plans. Comble de la vie, plus il s’entête sur son chemin, plus il retrouve la force de sa jeunesse.

Son dernier voyage, Tesson aurait pu le faire en 2014, après une chute de plus de 10 mètres de la façade d’une maison. Il n’en ressort pas tout à fait indemne, mais trouve assez de force pour enchaîner livres et nouveaux périples. De verticalité, il en est question dans les Piliers de la mer puisqu’en compagnie de son camarade alpiniste Daniel Du Lac, il entreprend d’escalader 106 stacks, de gigantesques bouts de falaise détachés de la côte au fil des siècles sous les coups de boutoir de la mer. C’est la côte qui recule et les stacks deviennent des sentinelles solitaires condamnées à mourir seules. Tesson nous gratifie d’une poétique de la verticalité démarrée dans son ouvrage précédent, Avec les fées.

Fulmir et Tesson sont deux solitaires (certains diront « au physique marqué par la vie ») qui auraient pu se rencontrer au cœur d’une forêt celtique. Ils se sont réunis le temps d’un week-end de lecture, entre terre et ciel, imaginaire et réel. Au fil de leur périple respectif, le nain et l’aventurier-romancier s’offrent une véritable cure de jeunesse à coup de ressac, de marche, d’escalade et de défis physiques en tout genre.